Accoub de Syrie

Gundelia tournefortii L., 1753

Famille Asteraceae (composée)

Plante laiteuse comme le Scolyme. Tige assez forte, rameuse, atteignant 0,30 m à 0,40 m de hauteur. Feuilles radicales longues, profondément incisées, à lobes bordés de denls épineuses. La nervure principale est grosse, blanche et couverte de duvet; feuilles caulinaires sessiles, semi-amplexicaules. En juin-août, fleurs purpurines, en capitules ovales, ressemblant à ceux de certains Panicauts (Eryngium). Involucre unisérié, monophylle, plus court que les fleurs, à écailles terminées par une pointe épineuse. Corolle régulière, glabre, à cinq lobes plus longs que le tube. Étamines 5, non saillantes. Stigmate bifide. Les quatre fleurons de la circonférence sont mâles ou stériles ; celui du centre est hermaphrodite. Fruit (akène) assez gros, ovale, dépourvu d'aigrette.

Plante vivace, originaire de l'Asie Mineure, où elle croît dans les lieux incultes. Tournefort l'observa dans son voyage au Levant et la nomma Gundelia, du nom de Gundelsheimer, son ami, qui l'accompagna dans ce voyage. On la cultiva longtemps, au Jardin des plantes de Paris, de graines provenant de ce voyage ; on la perdit ensuite, mais on ne tarda pas à se la procurer de nouveau. On y possède aujourd'hui de forts pieds de Gundelia, mais ils produisent très peu de graines fertiles ; d'autre part, comme chez beaucoup de plantes à racines pivotantes ou lactescentes, la division des touffes n'est guère praticable. Le Gundelia est donc d'une multiplication difficile.

Sa culture présente aussi quelque difficulté. Originaire d'un pays où la saison humide et végétative est de courte durée et suivie d'une période de sécheresse absolue, il arrive que, cultivée chez de nous, la ; plante a achevé sa végétation vers le milieu de l'été à partir de ce moment commence pour elle la période de repos, qui correspondrait justement, dans son pays d'origine, à la saison sèche. Nos automnes étant ordinairement pluvieux, il faut donc garantir la plante contre l'humidité en la couvrant d'une cloche ou d'un châssis, sous peine de la voir bientôt atteinte par la pourriture.

Une lettre adressée par M. Blanche, consul de France à Tripoli de Syrie, nous a été obligeamment communiquée. Elle fait connaître un usage de la plante que nous ne soupçonnions pas

« En fait de plantes qui vivent dans tous les milieux, je «vous en envoie une sur laquelle j'appelle toute votre sollicitude : c'est le Gimdelia Tournefortii L., à grosses racines et à feuilles épineuses. Les Arabes l'appellent Accoub, d'où Vaillant avait bien sûr formé le genre Hacub.»

« Il y a de nombreuses années que j'ai le désir de l'acclimater chez nous; j'ai dû vous en envoyer autrefois; j'en ai envoyé à Decaisne et à Palerme, etc., etc.. et je n'ai pas réussi ; je recommence mes essais de naturalisation cette année. C'est surtout comme plante potagère qu'elle mérite l'attention. Les jeunes pousses dépouillées de leurs épines, et surtout les capitules à l'état de boutons naissants, constituent un légume extrêmement estimé des Arabes, et qui,à mon avis, vaut l'Artichaut. »

Accoub.

Accoub de Syrie (Gundelia Tournefortii).

En Syrie, selon Boissier (Flora orientalis), on mange les jeunes tiges de cette plante après les avoir fait cuire. On la connaît sous le nom de Accoub.

Olivier, dans son Voyage en Orient, remarque que les racines de cette plante sont plus savoureuses, bien moins fades que celles du Salsifis et de la Scorsonère. « Il n'est pas douteux,dit-il,que cette plante ne réussisse très bien dans toute la France méridionale, et ne puisse y devenir une de nos meilleures plantes potagères. » (Lamarck, Encyclopédie, suppl.).

On voit, par ce qui précède, que les racines, les tiges, les capitules de l'Accoub sont également comestibles, en un mot que la plante entière constitue un excellent légume. Il n'avait pas été dit, avant que la lettre de M. Blanche nous l'apprît, que les capitules à l'état de boutons naissants fussent particulièrement recherchés ; or, ce sont précisément ces capitules que nous avons pu déguster. Nous n'avons pas jusqu'ici possédé un nombre de pieds qui nous permît de sacrifier quelques sujets pour en manger les racines ou les côtes ; mais, expérience faite, l'un de nous pouvait, en juin 1886, écrire à des amis : « Légume excellent! Plante féroce! Mon jardinier s'en est approché avec précaution, le sécateur à la main. Il a détaché une trentaine de boulons à fleur, ronds et du volume d'une grosse Fraise ananas.

« J'ai coupé les épines dont ils sont garnis et je les ai jetés au fur et à mesure dans l'eau fraîche. Au contact du fer, la section devient noire comme celle de l'Artichaut. Les boutons ont été cuits à l'eau et accommodés au beurre comme les flageolets, sans persil. Le résultat a été extrêmement satisfaisant, et ce n'est pas seulement l'avis de l'amateur qui vous écrit, mais aussi celui de toute sa famille. Le goût du légume est également voisin de celui de l'Asperge et de celui de l'Artichaut. L'Accoub serait appelé par les gourmets aux plus hautes destinées, s'il n'était pas le plus redoutable des Chardons, si les cuisinières pouvaient l'accepter. »

Un de nos correspondants, le docteur G., nous écrivait de Dijon, en octobre 1890 : « J'ai fait, cette année, une récolte d'Accoub qui a été trouvée excellente par tous.»

Nous cherchons à multiplier la plante, mais c'est une opération fort longue. Les graines lèvent difficilement, quelques-unes au bout d'un mois, d'autres au bout de trois mois. La moitié avorte. La plante exige ensuite quatre ans au moins pour atteindre son maximum de production.

Nous appelons néanmoins toute l'attention des amateurs sur le Gundelia; s'il ne peut pas être mis dans le commerce, il mérite une place d'honneur dans leurs jardins et sur leurs tables.

Les difficultés que peut présenter sa culture dans les environs de Paris n'existeraient pas dans le Var, dans les Alpes-Maritimes, etc., où la distribution de l'humidité et de la sécheresse est à peu près la même qu'en Syrie. Il est très désirable que des essais sérieux soient faits et qu'un résultat heureux soit le prix du zèle persévérant de notre consul.